La socialisation du chiot

La première chose dont un nouveau propriétaire de chien entend parler de nos jours c’est de la « socialisation ». L’éleveur en parle, le vétérinaire en parle, le web en parle…. donc le propriétaire s’empresse de vouloir « socialiser ».  Il ne reste plus grand monde (enfin, j’espère) pour préconiser que le chiot ne voie rien ni personne jusqu’après son rappel de vaccins (les chances de le voir contracter une maladie sont minces, celles de vous tricoter un chien timide, immenses).

La sagesse populaire a généralement réussi à faire passer le message d’une période dite « sensible » (de 3 à 12-16 semaines) dont il faut tirer profit au maximum (les 8, 10 ou 12 premières semaines seront laissées aux bons soins de l’éleveur – d’où l’importance capitale de choisir un chiot issu d’un milieu de vie à la fois riche et respectueux).

J’ajouterai que cette période continue à mon sens pendant l’adolescence (jusqu’à 7 ou 9 mois) et qu’il faut donc absolument éviter l’option récurrente d’une socialisation active jusqu’aux 4 mois du chiot (âge auquel il quitte généralement son « cours chiot » pour passer chez les grands) puis, plus grand chose, sous prétexte que le travail a été fait.

D’ailleurs, la socialisation du chien devrait se poursuivre pendant toute la durée de la vie d’un chien; elle ne devrait jamais vraiment s’arrêter – même si, effectivement, une socialisation précoce est primordiale.

Là où le bât blesse c’est sur la définition exacte de la dite « socialisation ». Un peu souvent, un nouveau propriétaire peu averti interprète celle-ci comme une simple exposition aux choses, endroits, personnes, autres animaux et aux congénères chiens.

Sauf que, « période sensible » veut bien dire ce que ça veut dire : si vous exposez votre chiot sans ménagement, ni sans tenir compte de ses émotions, à une quelconque expérience qu’il ne saura gérer, qui va lui faire peur, ces expériences négatives auront au moins autant d’impact que les positives.

Un grand classique : le chiot qu’on emmène en ville, au marché, au parc, à l’école et qui a peur, puis très peur… le propriétaire, dépité par la peur évidente de son chiot bien aimé va le soustraire à ce qui l’effraie quand il sera au paroxysme de sa peur et, par là, s’assure de manière efficace de voir son chiot avoir encore plus peur lors d’une prochaine exposition (en termes scientifiques, cela s’appelle « sensibiliser » – en clair, augmenter la peur). Ne pas le soustraire à un environnement qui le terrorise est à la fois très cruel et, souvent, impossible à faire : une immersion menant à une diminution de la peur peut prendre des heures, voir des jours entiers – impensable.

Socialiser c’est faire en sorte que toute expérience se révèle agréable – positive pour votre chiot.  Apprenez donc à la fois à bien « lire » votre chiot : une gueule fermée, des yeux ronds, des mouvements rapides de sa langue qui sort et rentre, des bâillements excessifs alors qu’il n’est pas fatigué, le fait de détourner sa tête ou son corps sont autant de signaux qui vous informent qu’il est mal à l’aise. C’est donc à vous de gérer scrupuleusement l’environnement : choisir une ruelle passante mais pas trop, la rencontre avec des enfants dont vous pourrez contrôler facilement les interactions, rester à distance  de ce qui pourrait effrayer votre chiot en observant ses réactions, contrôler le nombre de vos invités venus voir bébé-chien et leurs agissements avec lui, etc.

Se faire « mobber » par un groupe de chiens ou même de chiots survoltés (y compris à la fameuse « école du chiot ») n’est PAS de la socialisation mais une vraie expérience traumatisante pour votre bébé chien. Même si l’éducateur ou d’autres propriétaires des chiens présents vous exhortent à « laisser faire » – sachez prendre vos responsabilités – interrompez immédiatement, ce qui vous semble faire peur à votre chiot. Allez rapidement et calmement vers lui, récupérez-le, mettez-vous à bonne distance des autres chiots (voir à l’extérieur du terrain si nécessaire) et jouez avec votre chiot, en récompensant généreusement quelques petits exercices, ceux que font les autres à l’intérieur de l’enclos éventuellement. Tant pis si vous avez l’impression que « les autres » gèrent plus facilement… et alors? Tout le monde n’évolue pas au même rythme, que ce soit chez l’humain que chez l’animal et la meilleure manière de vous construire un chien craintif est de le soumettre à ce qui l’effraie sans ménagement aucun. Une exposition progressive, mesurée, réfléchie et beaucoup de renforcement positif (récompenses) aideront votre chiot à appréhender l’environnement à son rythme et à se construire des associations positives. 

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